Kidji's Book Club

« Les aventures de la foufoune » de Léonora Miano

Salut tout le monde,

J’espère que vous allez bien et que vous avez bien entamé le mois de février.

Je suis contente que le mois de janvier soit terminé car j’ai eu l’impression qu’il était plus long et plus pénible que les années précédentes. Pour quelles raisons? Je ne sais pas. A cause du temps? Du froid? Du climat politique peut-être.

En tout cas, je tenais à partager avec vous mon dernier coup de cœur : « Les aventures de la foufoune » de la romancière Léonora Miano.

Publié aux éditions du Seuil en octobre 2024, Léonora Miano ose un récit sensuel et sans tabous où les femmes peuvent aimer leur liberté et le corps des hommes, sans que cela puisse être un inconvénient dans notre société.

Léonora Miano poursuit sa réflexion sur le vécu féminin. Dans les différents monologues de ce roman, elle explore et célèbre le plaisir sexuel des femmes et la recherche d’un nécessaire équilibre.

Et si le sexe des femmes était à la fois l’origine du monde et son centre ?

De nombreuses cultures africaines racontent que le monde naît du sexe des femmes. Léonora Miano a voulu s’amuser avec cette idée, mais aussi rappeler que les êtres humains ont souvent considéré que la création de l’univers émanait du féminin.

Ne faudrait-il remettre dans nos imaginaires cette idée ? Nous commencerions peut-être à régler pas mal de problèmes. Non..?

Les dix titres des chapitres nous annoncent les différents angles d’analyse de la sexualité féminine. Léonora Miano nous fait découvrir la véritable histoire du commencement du monde, des rites initiatiques, des tranches de vie réjouissantes ou cruelles (quand il s’agit de viol), ayant toujours en leur cœur le sexe d’une femme.

La première aventure est celle de la « foufoune des premiers temps, avant le commencement ». Mangamba ou « l’océan primordial », crée le monde en se masturbant :

« Suivant une inspiration connue d’elle seule, la déesse ouvrit les jambes, glissa une main, la gauche, entre ses cuisses monumentales.

Se caressant la vulve, l’Être suprême se fit jouir.

L’abondance de son plaisir créa fleuves, rivières et lacs.

Ainsi naquit la vie.

Au commencement était la Fente, et la Fente était divine. »

Elle a pour descendantes des femmes qui connaissent leur corps, qui lui accordent une place centrale :

« La peau, le corps, le sexe, seraient donc, pour une catégorie de femmes, les territoires aussi bien que les outils de leurs initiations.

Ce serait par ces voies, par ces moyens, qu’elles connaîtraient et comprendraient, qu’elles s’élèveraient.

Chaque génération de ces femmes donnerait naissance à des guides qui prendraient la parole afin de révéler à leurs sœurs les multiples usages de l’érotisme ».

J’ai particulière apprécié le monologue de la « foufoune au bois dormant » qui raconte son réveil au passage de la quarantaine : « enfourchant la vie telle une Harley, elle s’élance à l’assaut de nouveaux défis » pour « conquérir l’amour version torride ». 

Elle choisit de mener une vie sexuelle libérée du jugement des autres et qui s’accorde avec sa relation amoureuse. Alors que la société patriarcale voudrait la ranger dans la catégorie des foufounes fatiguées, celle-ci se réinvente et prouve que le désir féminin ne disparait pas à la ménopause!

Quant à la « foufoune du grand large », elle nous raconte comment elle découvre le monde à travers ses relations sexuelles : « Je suis venue au monde pour connaître le monde. Ma vulve est mon gouvernail, le corps des hommes, le vaste territoire que je ne me lasse pas d’arpenter. »

Dans cet ouvrage, Léonora Miano nous rappellent également combien nous les femmes noires sommes souvent racialisées dans notre sexualité. Dans le monologue de la foufoune de cinquante ans, elle analyse le regard porté sur le couple qu’elle forme avec un jeune homme blanc :

« Il n’est pas admissible qu’un homme blanc, dans la fleur de l’âge et en pleine possession de tous ses moyens, promène à son bras une antiquité africaine.

C’est au-delà de la culpabilité coloniale.

C’est de la haine de soi, un attentat contre la civilisation. »

Elle ne veut pas pour autant être la caution noire ou encore « la panthère exhibée par Tarzan, la bonne conscience de l’héritier du rapt et des rapines ou de l’impérialiste de gauche, la planche de salut de celui qui, souffrant de culpabilité coloniale, s’apaise au contact d’une damnée de la terre. »

Dans cet ouvrage, il n’est jamais question de se poser en victime mais plutôt de s’affranchir en tant que femme et de faire ses propres choix.

Le combat sera gagné quand les femmes accepteront et feront accepter leur corps tel qu’il est, car :

« Si vieillir sans tralala exige de nos contemporaines tant d’efforts, c’est à cause des vérités tues, de tous les mensonges cultivés (…).

Quand les femmes franchiront ce cap, elles n’auront plus à protester, militer, lutter.

Cela voudra dire qu’elles ont triomphé de tout. »

Léonora Miano porte, avec humour et impertinence dans une langue parfois familière, les voix de la liberté des femmes.

Une exploration sensuelle qui donne à penser autant qu’à ressentir. Je ne peux que vous recommander la lecture de ce magnifique ouvrage. Bonne découverte et à très bientôt.

Léonora Miano, Les aventures de la foufoune, Seuil, octobre 2024, 168 pages, 17 euros

kidji

"Always higher and further together!" N'ayons pas peur de rêver et de voir la vie en GRAND!
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Joyeuse et optimiste dans la vie, je tente de faire en sorte que cela transparaisse dans mes lignes que je vous livre ici.
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