Une réalisatrice et scénariste afro-latina explore son identité et ses différents traumatismes transgénérationnels en grandissant à New York et en fréquentant une université majoritairement blanche.
« Courageuse, têtue, narcissique » : Avec ces trois mots provocateurs, la voix off de Rebeca Huntt semble anticiper la réaction de la critique de « Beba », son premier film documentaire qui se double de mémoires impressionnistes.
« Dès les premiers jours de l’écriture de ce film, je ne voulais pas que « Beba » soit un archétype ou une sainte.
Bien au contraire, « Beba » devait être aussi peu exceptionnelle, aussi humaine que possible »
Rebeca Huntt.
Le projet est une odyssée de huit ans, qui retrace le malaise identitaire de l’adolescente, ses années au Bard College en tant que jeune artiste afro-latina et son retour chez ses parents.
Sa mère est vénézuélienne et son père dominicain. Rebeca est peut-être une nouvelle venue, mais sa voix est chaleureuse et terre à terre.
« Vous entrez maintenant dans mon univers« , dit-elle au début du documentaire, sonnant comme le maître de cérémonie d’un cirque luxuriant, à l’échelle domestique.
« Je suis l’objectif, le sujet et l’autorité ».
Rebeca Huntt
Elle attribue au film le mérite de lui avoir donné « le sentiment d’acceptation de soi auquel je serais probablement parvenue, à coup sûr, dans 20 ou 30 ans ».
Rebeca Huntt dans son film documentaire « Beba » qui parle de son enfance afro-latino à New York.
Outre les magnifiques plans cinématographies, ce qui frappe le plus dans le film documentaire autobiographique « Beba », ce sont tous ses moments de vulnérabilité qui nous plongent dans les traumatismes familiaux et personnels de la cinéaste afro-latina; notamment les violentes disputes avec sa mère et ses amis blancs.
« Beba » est un film, écrit, réalisé et produit par Rebeca Huntt. Il retrace la migration de sa famille vers New York, ses années d’études au Bard College dans le nord de l’État, puis son retour chez ses parents à Central Park West.
Le surnom « Beba » fait référence au surnom de la réalisatrice dans son enfance. C’est sa mère qui l’appelait affectueusement « Beba »; ce film n’est pas une histoire de rédemption d’immigrés dont on parle encore trop souvent.
En effet, à travers la poésie et la narration, on retrouve des voix d’écrivains connus comme James Baldwin et Audre Lorde, et des entretiens avec sa famille et ses amis.
Rebeca, fille d’un père noir dominicain et d’une mère vénézuélienne, reconstitue les parties douloureuses de son histoire familiale et sociale, en extrayant sa propre identité des vestiges de ses traumatismes transgénérationnels.
« Chacun d’entre nous hérite des malédictions de ses ancêtres »
Rebeca Huntt
L’accent est mis sur la relation conflictuelle qu’elle entretient avec sa mère et sur les tensions qui se développent entre elles, devant et hors caméra.
Rebeca s’interroge également sur ses relations avec ses amis blancs dans un contexte de tensions raciales et politiques croissantes.
En revanche, les dynamiques avec et entre les hommes de la famille sont sous-explorées. En effet, le père de Rebeca semble être une figure paternelle idéalisée. Certes il est interviewé dans le cadre de ce documentaire, mais on sent qu’il évite les questions difficiles.
On a l’impression qu’il est laissé de côté, peut-être parce que la relation de Rebeca avec sa mère prend beaucoup de place.
De plus, bien que son frère joue un rôle important dans l’histoire racontée, les deux sont séparés et son absence dans le film est palpable.
Malgré tout, « Beba » est un film profond. La réalisatrice se penche sur l’ensemble de son identité, y compris sur ses aspects les plus sombres ou les plus destructeurs, ce qui nous pousse à prendre conscience de la complexité de Rebeca Huntt, et aussi de notre propre complexité!
« Beba » de Rebeca Huntt, un film documentaire disponible sur Disney +