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« L’autre langue des femmes » de Léonora Miano

« Les sociétés de femmes étaient et restent nombreuses en Afrique subsaharienne. Leur autorité fut aussi politique.

Venus de pays où cela n’existait pas, les colons européens n’accordèrent pas d’intérêt à ces instances féminines dont la voix fut alors étouffée ».

Léonora Miano

« L’autre langue des femmes » est un ouvrage exceptionnel où Léonora Miano rend hommage aux histoires de femmes d’Afrique subsaharienne. Des histoires si riches qui demeurent encore méconnues.

Cet ouvrage nous plonge à la rencontre de reines, de commerçantes, de guerrières ou encore de résistantes à la colonisation.

On y découvre une vaste galerie de portraits de gouvernantes, combattantes, bâtisseuses, mères, épouses de l’Antiquité à aujourd’hui.

Toutes ces femmes Subsahariennes méritent d’être connues pour leurs actions, leurs combats et leur voix.

Viola Davis et Thuso Mbedu  dans le film « THE WOMAN KING » en hommage aux Amazones du Danhomè

A l’heure où l’on aime parler de sororité, il importe de l’envisager en connaissant l’histoire de celles que l’on souhaite célébrer en les présentant au monde.

En inscrivant sa réflexion dans un mélange de mythes et d’histoires africaines, Léonora Miano veut faire émerger une alternative afro-centrée au mouvement féministe.

« L’autre langue des femmes » est un ouvrage qui pose les jalons d’une alternative africaine au féminisme occidental.

On en retient une réflexion dans un mélange de mythes et d’histoires de femmes Subsahariennes et l’injonction à la construction d’une identité féminine par les femmes elles-mêmes.

« Sur notre continent, les femmes furent tout ce qu’un humain peut envisager d’être.

Sans elles, il n’y a tout simplement pas d’histoire. » Léonora Miano

Toutes les histoires partagées dans cet ouvrage mettent en lumière un matrimoine dans lequel, nous, femmes Noires, pouvons nous identifier et nous sentir proches.

Léonora Miano met à notre disposition des nombreuses et belles références historiques de femmes Subsahariennes qui nous donneront la force et l’envie de nous dépasser, de prendre davantage confiance en nous pour aller à la rencontre du monde.

Car oui, ces femmes Subsahariennes qui ont fait l’histoire n’ont pas attendu d’avoir des modèles.

« L’autre langue des femmes » n’est clairement pas un ouvrage féministe, car, selon Léonora Miano, le féminisme apporte une réponse pour les femmes d’un lieu précis aux questions qui se posent à elles.

Ce mouvement serait l’apanage de femmes qui se présentent principalement comme « les victimes de la domination masculine, ce qui forge une ontologie féminine victimaire ». 

L’auteure déplore que le féminisme soit parfois comme un impérialisme, à croire que tout ce qui s’exprime en dehors de lui est d’emblée perçu comme rétrograde et réduit au silence.

« Féministe est devenu le nom de tout ce que font les femmes dès lors que cela semble avoir quelque pertinence.

Le mot est devenu synonyme de valeurs qui le précédèrent et furent incarnées par des femmes bien avant que celles d’Occident aient à croiser le fer avec les hommes de leur environnement. » Léonora Miano

Chaque femme devrait se sentir libre d’être féministe ou pas.

Il est important pour l’auteure de laisser de l’espace aux autres femmes pour se penser hors des mouvements féministes.

Tout ce que les femmes produisent de valable n’a pas à être qualifié de féministe.

« Tout ce que les femmes énoncent quant à leur vécu n’a pas à porter ce label qui devient parfois une assignation ».

Léonora Miano accuse l’influence de ce nouvel impérialisme à la fois inadapté aux contextes subsahariens et superflu, car les femmes Subsahariennes qui imitent les femmes Occidentales seraient les héritières d’une histoire qui « d’hier à aujourd’hui, ne se raconte pas sans mentionner les femmes ou le principe féminin ».

« L’autre langue des femmes » exhume un imaginaire enseveli par les influences occidentales.

Le double objectif de ce matrimoine serait de permettre aux femmes Subsahariennes « de se connaître et de se penser hors de toute comparaison avec l’être de sexe masculin » mais aussi d’adapter leur contexte à l’époque contemporaine sans se dénaturer.

Statut rendant hommage aux Amazones à Cotonou

« L’autre langue des femmes » élargit l’horizon de matrimoines à redécouvrir.

A travers le partage de ces histoires, on y ressent de la force, de la fierté et de l’assurance.

L’auteure nous présente la princesse Mkabayi des Zoulous, la reine Labotsibeni des Swazis, une reine anonyme au Rwanda dont la jouissance aurait donné naissance au lac Kivu, la régente du Danhomè Tassi Hangbe qui créa le corps armé exclusivement féminin baptisé « les Amazones », Amanirenas la candace qui perdit un œil sur le champ de bataille, la reine Njinga qui soumettait tous les corps à ses désirs…

Toutes ces femmes parleraient cette langue « autre », définie de façon trouble comme étant celle « de femmes ne se définissant pas à travers l’action négative d’autres sur elles, et n’attendant pas d’avoir des modèles pour inventer leur vie ». 

Il va s’en dire que je ne peux que vous recommander cet ouvrage qui je l’espère vous donnera confiance en vous pour déplacer des montagnes.

Bonne lecture!

« L’autre langue des femmes » de Léonora Miano, Grasset, Septembre 2021.

La reine Labotsibeni Mdluli

kidji

"Always higher and further together!" N'ayons pas peur de rêver et de voir la vie en GRAND!
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Joyeuse et optimiste dans la vie, je tente de faire en sorte que cela transparaisse dans mes lignes que je vous livre ici.
A très vite!

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2 commentaires

  1. Kadidiatou Camara OLATOUNDJI a dit :

    Belle découverte !!!

    1. Merci beaucoup Kadi!
      A très bientôt.

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